LA QUESTION DE L’ÉNERGIE

Depuis le mois de septembre, nous avons pu entendre parler de “sobriété énergétique” dans les débats politiques à maintes reprises. Une question prédomine les discussions autour de la controverse : aurons-nous assez d’électricité pour l’hiver ? Derrière cette interrogation, l’enjeu principal est bien évidemment l’économie d’énergie. C’est un des points sur lequel le gouvernement français s’est investi le plus pour que le pays passe l’hiver sans coupures de courant.

Les points importants sur la question de l’énergie
Les positions du gouvernement, agences et opposants politiques

Pour le gouvernement, la notion de sobriété énergétique s’est rapidement imposée comme une nécessité à prendre en compte dans l’agenda. Dans un premier temps, le président Emmanuel Macron évoquait souvent l’idée d’une “sobriété volontaire” basée sur l’intelligence collective et sur l’économie d’énergie de la part des citoyens français par le biais “d’écogestes”. Jusqu’à présent, le gouvernement s’est toujours opposé à une sobriété plus contrainte mais l’a toujours envisagé comme une éventualité en cas de crise majeure. Le plan d’action pour la sobriété du gouvernement évoque davantage de petits gestes qui auraient un effet sur le long terme que de décisions plus contraignantes.

Les agences gouvernementales comme l’ADEME n’agissent donc pas “pour la sobriété” comme l’entendent les scientifiques, ces derniers affirmant que la sobriété passe obligatoirement par une limitation des ressources. Selon Emmanuel Macron, la sobriété serait seulement un moyen de “gagner en efficacité”.

Cette position du gouvernement est remise en cause par les opposants politiques et notamment par les partis socialistes. Selon eux, le plan de sobriété du gouvernement serait déconnecté d’une réalité où le français moyen baisse déjà son chauffage depuis des années afin de réduire ses dépenses. Ces mêmes opposants soulignent le manque de préparation du gouvernement face à la crise énergétique et rappellent que les mesures prises par le gouvernement pour la sobriété existent depuis l’accord de Paris en 2015. On peut alors se demander si la France aurait pu éviter d’en arriver à une telle situation en respectant cet accord dès le départ.

Mouvements associatifs, ONG et organisations internationales

Il semble y avoir un consensus entre les associations, les ONG et les mouvements citoyens luttant pour la protection de l’environnement : un plan de sobriété ne peut être efficace sur le court terme sans contraintes sur des ressources dont nous connaissons les limites. Selon un des porte-paroles de l’association négaWatt regroupant des experts et des citoyens, miser sur la seule volonté des entreprises et des citoyens ne suffira pas pour atteindre des objectifs viables de développement durable. Pour de nombreuses ONG, si les mesures contraignantes proposées par les ONG semblent irréalistes et trop ambitieuses à l’heure actuelle, c’est parce que les gouvernements n’ont pas porté assez d’importance à ces questions sur les dernières décennies. Autrement dit, le retard de la France sur les énergies renouvelables, l’inaction climatique et le manque d’investissement sur notre souveraineté énergétique expliqueraient en partie la nécessité d’adopter une politique de sobriété énergétique à l’heure actuelle.

Il s’agit cependant de rester optimiste : certaines associations pensent que les mesures du gouvernement, bien que critiquables, pourraient constituer un premier pas vers un monde plus vert. Si le gouvernement actuel parle de gestes ayant un impact concret sur le long terme, seul le temps pourra donner raison (ou non) à ces politiques environnementales.

Du côté des organisations internationales (COP, ONU, AIE…), de nombreux pays sont critiquables sur leurs actions concernant la sobriété dans le sens où les mesures préconisées par ces pays existent depuis des dizaines d’années dans différents plans d’actions et pactes internationaux. Le gouvernement français, par exemple, n’a pas respecté les accords de Paris pour proposer des mesures identiques dans leur plan de sobriété. Selon le GIEC, les mesures politiques concernant la sobriété devraient permettre d’éviter une crise énergétique tout en offrant un mode de vie décent et égalitaire à chacun dans le monde. Face à ce défi de taille, une politique incitative concernant la sobriété n’est pas adaptée : il faut des politiques publiques efficaces et orientées par les objectifs de développement durable.

La parole des experts sur la question

Selon les experts sur les sujets de l’énergie mais aussi de la décroissance, cette “crise” énergétique aurait pu être anticipée avec une vue plus globale sur les politiques des précédents gouvernements. Là aussi, les experts pensent que les mesures nous semblent ambitieuses à l’heure actuelle car le pays a été pris de court à cause du manque d’anticipation sur ces dernières années.

Il semble y avoir un consensus : la sobriété n’est pas seulement un moyen de devenir “plus efficace” comme le déclarait le président Emmanuel Macron dans ses interventions sur le sujet. Lors de son intervention sur France Inter, l’économiste français Eloi Laurent a donné un contrepoint total à cette définition en ouvrant les perspectives. Selon lui, le concept de sobriété doit être replacé dans un cadre plus global. La décroissance serait alors un “moyen de transition” vers la sobriété et non une finalité, contrairement à ce qu’affirment certains membres du gouvernement.

Enfin, une partie des experts critiquent le manque de dimension sociale dans le plan de sobriété du gouvernement français. Selon l’IDDRI, un institut de recherche indépendant, le plan devrait demander davantage d’efforts aux plus aisés sachant que ce sont aussi ceux qui consomment le plus selon de nombreuses études. Cette discussion rejoint les récents débats controversés au sujet des jets privés.

Finalement, la position des experts sur ce sujet permet aux associations et aux organisations internationales de rendre leurs propos concernant l’action gouvernementale plus légitime.

Et les médias dans tout ça ?

Comme toute controverse, les médias sont divisés sur la question et à l’heure actuelle, le rôle du politique dans la gestion de l’énergie varie selon les points de vue. Si certains médias servent uniquement à relayer la position du gouvernement ou des experts sur ces questions, d’autres médias spécialisés prennent parti et analysent plus en détail les points de vue sur la controverse.

Blast, un média indépendant, a par exemple sorti une analyse du plan de sobriété sur sa chaîne YouTube. Dans la vidéo, la journaliste et militante écologiste Paloma Moritz n’hésite pas à prendre parti en s’opposant au gouvernement sur de nombreux points sans pour autant mettre la parole d’un des acteurs de la controverse à un niveau moins important qu’un autre.

SANS OUBLIER LE NUMÉRIQUE !

Suite à l’annonce du plan de sobriété du gouvernement français, nous avons vu passer cet hiver différentes contraintes concernant l’éclairage, le chauffage ou encore les limitations de vitesse. Il semble que dans cet ensemble de mesures, le numérique passe au second plan. 

La sobriété numérique n’est alors pas pour l’instant considérée comme un moyen “concret” dans l’objectif de diminuer notre consommation d’énergie. Cependant, au-delà des enjeux politiques et économiques, la recherche montre que nos usages du numérique ont un impact considérable sur l’environnement. Que l’on parle d’un mail ou d’un data center, le manque de prévention et de sensibilisation sur le sujet se fait ressentir.